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La naissance de Zoé

Probablement le jour le plus incroyable de ma vie

Comme je le disais précédemment, on avait visité une clinique privée mais on n’avait pas eu l’occasion de le faire dans l’hôpital publique et on a eu le droit à une bonne surprise : il y a plusieurs chambres de travail différentes, avec différentes options et on nous en a proposé une avec un grand lit, un système de suspension pour que Manon puisse limiter la douleur lors des contractions et une grande baignoire pour se détendre entre 2 contractions. Vous imaginez bien que c’est celle-ci qu’on a choisi ! (Je ne parle pas des autres car je ne m’en souviens même plus)

On est arrivé en fin d’apres midi à l’hôpital et les choses sérieuses ont commencées au milieu de la nuit, quand les contractions de Manon se sont rapprochées de plus en plus et se sont faites de plus en plus douloureuse. Manon étant une dure à cuire, tant que ce n’était pas intenable, hors de question de prendre quoi que ce soit contre la douleur…

En attendant, elle se balade dans l’hôpital, discute avec ses collègues, tout ça, tout ça… une femme enceinte quoi.

Aux environs de 3h du matin, une infirmière vient proposer à Manon de lui poser la péridurale car l’anesthésiste vient d’en poser une sur une autre future maman et qu’apres il va se coucher, donc, c’est maintenant ou pas du tout. On la déplace donc dans une salle d’accouchement pour pouvoir lui installer la péridurale. Elle ne s’était pas rendu compte à quel point elle avait mal et ça lui à permit de dormir un peu sur la table d’accouchement tandis que moi je me positionnais comme je pouvais sur une chaise en plastique à côté d’elle pour essayer de dormir aussi (et je devais m’estimer heureux car, normalement, c’est un simple tabouret que le papa à droit). On était tellement fatigué qu’on a réussi à dormir 2-3 heures quand, d’un coup, sans prévenir, Manon a perdu les eaux.

De mon côté, je sentais le stress monter et c’était contradictoire avec l’ambiance général de la pièce. Manon avait les yeux fermés, derrière elle le levé du soleil qui donnait directement sur l’héliport de l’hôpital. Une chouette ambiance, vraiment.

D’un coup, Manon sent quelque chose la toucher au niveau des cuisses, elle regarde, et elle découvre une nouvelle jambe, fraichement apparue, qui gigote dans tous les sens. On appel quelqu’un qui confirme qu’on est vraiment plus tres loin de voir arriver notre petite.

Il faut savoir que j’aime beaucoup raconter des conneries, faire des blagues ou des jeux de mots pourris. Quand la sage-femme constate qu’une jambe est déjà là, je n’ai pas pu m’empêcher de lui dire : Ma virilité en prend un coup, entre ma femme et moi, c’est la seule qui peux dire qu’elle aura eu une 3eme jambe sans exagérer quoi que ce soit…

Tout le monde rigole, la tension baisse d’un cran et ça va mieux.

C’est vraiment étrange car, au moment ou j’écris ces lignes, je ressens exactement la même tension que j’avais à ce moment-là, l’appréhension de la naissance, d’avoir un enfant, qu’il y ait des complications ect…

Quand on a su que Manon devait rester à l’hôpital, j’ai fait un saut à la maison pour me doucher. Je ne saurais pas expliquer pourquoi exactement, mais j’ai ressenti le besoin de me préparer comme pour un RDV. Je me suis rasé et j’ai mis un de mes teeshirt préféré qui donne une bonne idée de ma personnalité et de mes gouts. Ce teeshirt est bleu foncé, il a une sorte de cercle fait d’hexagones multicolore pour faire référence de l’album The Resistance de Muse, l’un de mes groupes de musique préféré, sauf qu’au lieux d’avoir un homme sur la sorte de rampe, c’est un kart de Mario Kart, l’ensemble faisant référence à la course Arc en Ciel présente dans chacune des versions du jeux. Vraiment, ce teeshirt est une assez bonne synthèse de mes gouts et on peut en déduire une bonne partie de ma personnalité rien qu’avec celui-ci.

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Encore aujourd’hui, je suis incapable de le remettre et je pense que je ne le remettrais jamais, j’en sais rien. Pour moi, il est lié à sa naissance, il est lié à Zoé désormais et rien d’autre.

Manon commence à sentir que quelque chose se passe, la péridurale faisant bien son office, ce ne sont plus vraiment les douleurs qui la guide, mais vraiment ce qu’elle ressent. On appel une sage-femme qui nous dit que le gynécologue vient de finir un autre accouchement et qu’il arrive.

2 minutes et 2 poussés, c’est le temps qu’aura durée l’accouchement à proprement parler. Le gynécologue était presque déçu. De mon côté, je craignais d’être présent à l’accouchement, je suis tres sensible à la souffrance des autres et j’avais vraiment peur de ce moment. Là, on peut dire que je n’ai pas eu le temps de comprendre ce qu’il se passe et c’est tant mieux car je pense que j’aurais regretté de ne pas avoir été présent.

A peine ce petit être arrive dans notre monde qu’elle est présentée à sa mère, la 1ere chose que Manon fait, c’est compter le nombre de doigts de main et de pied et se rend compte qu’il lui manque les ongles des petits doigts de ses tout petits pieds mais aussi des petits doigts de ses toutes petites mains. La sage-femme vérifie, constate la même chose et s’exclame : Bah, elle est unique !

Ces quelques mots nous ont rassurés car, si la sage-femme ne s’en inquiète pas plus que ça, c’est que ça ne doit pas être si inquiétant que ça.

Quelques semaines avant la naissance, j’était chez des amis, sans Manon, et une amie me demande si je prends conscience un peu de tout ça. D’un air tres détaché je lui dis que non et elle me répond : ok, donc, ce sera le camion à la naissance.

Je n’ai pas compris sur le coup ce qu’elle voulait dire, jusqu’à ce qu’on la mette dans les bras pour faire un « peau à peau » avec elle. Je tremble en écrivant ces mots et je ressens un mélange de bonheur à me rappeler ce moment et de tristesse car elle n’est plus là. Quand elle était contre moi, une émotion incroyable m’a envahi. C’était comme si je l’avais toujours connue, comme si je l’avais toujours aimée. Jamais de ma vie je n’avais ressenti un truc pareil, j’ai rencontré cette petite et en quelques secondes, je me suis pris un camion d’émotions dans la tronche, sans prévenir. Ça y est, j’ai compris l’histoire du camion. J’ai regretté, instantanément, d’avoir tout fait pour ne pas avoir d’enfant pendant toutes ces années.

Maintenant qu’on l’a rencontré, on est d’accord sa mère et moi, elle s’appellera Zoé.

De son coté, Zoé, elle, cherchait mon sein pour une première tétée. Bon, comme vous vous en doutez, quand on est stressé on ne produit pas de lait, et là, j’étais vraiment stressé… Blague à part, c’était vraiment mignon à voir, cet instinct, elle avait déjà compris qu’elle était sur une poitrine et que c’est de là qu’on se nourrit.

On la repasse à sa mère pour la première tétée qui se passe plutôt bien et, puisque tout s’est bien passé, Manon peut aller en maternité avec elle.

De mon côté, épuisé mais sur un nuage, je décide de rentrer me reposer quelques heures pour revenir un peu plus tard dans l’apres midi.

Quand je suis revenu à l’hôpital quelques heures plus tard, je croise ma mère près des urgences. Je m’approche d’elle et je lui dis « vous cherchez quelqu’un ? » avec un grand sourire. D’un air grave elle me répond que ma grand-mère vient de faire un AVC et qu’elle est en train d’être prise en charge en ce moment même. L’ascenseur émotionnel. J’envoie un mot à Manon qui n’hésite pas à descendre de la maternité, pourtant quelques étages plus haut, pour venir voir ce qu’il se passe auprès de ses collègues aux urgences, là ou on n’a pas le droit d’aller en tant qu’accompagnant.

Ma grand-mère va bien, elle a repris ses esprits mais va rester en observation quelques jours et lui faire quelques examens.

La journée fut pour le moins mitigée mais finalement, elle se sera mieux passé que le lendemain…

Note

Je ne vous cache pas qu’à la fois j’avais hâte de raconter cette journée, je sais que je me souviendrais toute ma vie de ce moment, et qu’en même temps, je l’appréhendais car je ne pourrais plus jamais la prendre dans mes bras, que la personne qui m’a provoqué la plus forte émotion que j’ai jamais ressentit n’est plus là.

Christophe MAUNIER
Généré avec Hugo
Thème Stack conçu par Jimmy